Tour de clocher bâtie sur un menhir renversé
Lieux - Page 4
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Sanctuaire druidique et templier de Trun (Orne)
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Tchernobyl et l'Étoile Absinthe
Lorsque le troisième Ange de l’Apocalypse sonne dans sa trompette survient alors la chute d’une « grande étoile brûlant comme une torche ». Ce flambeau, que l’on retrouve brandi par la Statue de la Liberté américaine et luciférienne, se dit en hébreu lapid. C’est la même torche qu’utilise Prométhée, dans son hybris et son « progressisme », sur le char du soleil pour voler le « savoir divin »…
L’astre tombé sur la terre est l’Étoile Absinthe. Voici ce qui est dit dans la Vulgate clémentine :
« Et tertius angelus tuba cecinit : et cecidit de cælo stella magna, ardens tamquam facula, et cecidit in tertiam partem fluminum, et in fontes aquarum : et nomen stellæ dicitur Absinthium, et facta est tertia pars aquarum in absinthium ; et multi hominum mortui sunt de aquis, quia amaræ factæ sunt » (Ap 8, 10-11).
La chute de cette « étoile brûlante » n’est pas sans rappeler celle du Roi de Babylone sous les traits de Lucifer, l’étoile brillante du matin : « Quomodo cecidisti de cælo, Lucifer, qui mane oriebaris ? » (Es 14, 12). Et la contamination des eaux douces n’est pas sans rappeler non plus les eaux du Nil changées en sang avec puanteur et semant la mort (Ex 7, 17-21). Cela rejoint la troisième Coupe de l’Apocalypse versée par l’ange des eaux (douces) :
« Et tertius effudit phialam suam super flumina, et super fontes aquarum, et factus est sanguis. Et audivi angelum aquarum dicentem : Justus es, Domine, qui es, et qui eras sanctus, qui hæc judicasti : quia sanguinem sanctorum et prophetarum effuderunt, et sanguinem eis dedisti bibere : digni enim sunt » (Ap 16, 4-6).
On retrouve, au passage, cette mention d’un astre maléfique annonçant la fin du monde dans la culture actuelle, souvent largement subversive et occultisante, comme dans les films Deep Impact (1997), Armageddon (1998), la saga Star Wars, avec l’Étoile noire ou Étoile de la mort, et surtout Melancholia (2011) du réalisateur danois Lars von Trier ou dans la chanson (et son clip vidéo très énigmatique où l’on trouve un culte de possession autour d’un crâne venu de l’espace, une éclipse, un nouvel évangile et une parodie de la crucifixion…) Blackstar (2015) de David Bowie, sortie peu de temps avant sa mort (le foie dévoré par l’aigle du Caucase envoyé par Zeus ?).
La catastrophe majeure de Tchernobyl, dans le « nœud » de forces mauvaises qu’est devenue l’Ukraine, eut lieu le 26 avril 1986 à la centrale nucléaire « Lénine », transformée il y a trente ans en une « tour du diable » maléfique et aujourd’hui encore entourée d’une vaste « zone interdite » dans un rayon de trente kilomètres. La référence directe au dirigeant communiste n’est pas anodine. Un parallèle peut être ainsi fait avec son Mausolée démoniaque (cf. le Mausolée d’Halicarnasse : la femme de Mausole, Artémisia, est reine de Carie en Turquie…) de la Place Rouge à Moscou, construit sur le modèle du Temple de Pergame (« Trône de Satan » de la troisième Église dans l’Apocalypse) et lieu d’un pèlerinage « à rebours » autour de son cadavre conservé et exposé. La chute de l’Étoile Absinthe a précipité aussi quelque part la chute de l’Étoile Rouge (comme la « forêt rouge » irradiée…) de l’Union Soviétique qui a voulu dominer le monde (dissolution de l’U.R.S.S. le 26 décembre 1991).
Avant Tchernobyl, d’autres catastrophes avaient déjà eu lieu dans les pays soviétiques mais sans la même ampleur, répercussion et portée symbolique. Par ailleurs, la région de Brahine (ou Braguine), ville de Biélorussie, avait connu la chute d’une météorite au début du dix-neuvième siècle (premiers blocs découverts en 1810). La région russe est d’une manière générale propice aux pluies de météorites. Ainsi, en 1908, une météorite d'une cinquantaine de mètres de large avait explosé dans la région de la Tunguska en Sibérie, rasant 2000 kilomètres carrés de forêt. Plus récemment, en février 2013, une météorite chute et fait plus de 1000 blessés autour de la ville de Tcheliabinsk en Russie.
Il est à noter encore qu’il existe un « Projet Wormwood (du nom anglais de l’absinthe) » scientifique d’étude et de détection de la menace d’impact cosmique d’astéroïdes sur la terre et de défense planétaire. Il y est fait explicitement mention de la chute de l’Étoile Absinthe (voir http://www.sws.bom.gov.au/IPSHosted/neo/des/overview.htm). Certains parlent aussi du danger du passage d’une neuvième planète : la « planète X » Nibiru (mais le débat reste ouvert…).
Dans L’Idiot de Dostoïevski, on se moque du personnage de Lébédev qui voit dans l’Étoile Absinthe les chemins de fer dont le réseau couvre toute l’Europe… Nous ne voulons pas ici imposer une lecture unique et arbitraire mais montrer un important faisceau d’indices pouvant expliquer une réalité historique à la lumière d’une prophétie biblique, elle-même porteuse d’un riche symbolisme et d’une profonde théologie du péché. La montée en puissance de l’iniquité et de l’injustice dans le monde entraîne inéluctablement châtiment et chute. C’est ce à quoi s’oppose la quatrième Béatitude (« Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice… », Mt 5, 6).
Très curieusement, le 9 février de la même année 1986 passait la comète de Hallay (à l’opposé du soleil par rapport à la terre). De plus, la veille même (soit le 25 avril) de l’incendie et de l’explosion de la centrale nucléaire, il y avait une éclipse lunaire totale en conjonction avec la planète Pluton, le dieu noir des enfers qui régit l’énergie nucléaire (cf. le plutonium par exemple). Le « cœur » du réacteur s’est mis à brûler sur les terres noires de Tchernobyl (ce qui fait penser à la « terre noire » de l’Égypte ancienne…), qui reste encore aujourd’hui, alors que le site est fermé, un lieu hautement dangereux où continue de brûler sous le couvert le « magma » radioactif.
Ce ne fut pas à proprement parler un accident dû à une « simple » défaillance humaine mais bien un acte volontaire de mise en danger effectif en repoussant les limites jusqu’au point de non-retour (réelle incompétence et insouciance, folie passagère, expérience intentionnelle de la part de l’Union Soviétique ou intervention d’intelligences extérieures ?), un « projet de loi noir » selon un jeu de mots sur le nom de Tchernobyl. Quelles sont les finalités ultimes de cette « expérience » inédite (même si ce n’est pas la première !), allant jusqu’à la création de monstres et de mutations génétiques, sous prétexte d’un test incluant une désactivation des systèmes de sécurité ? C’est comme si une partie de l’Europe avait été rayée de la carte, livrée au « mal noir » radioactif, cet ennemi invisible que plus de 500 000 « soldats » plus ou moins désarmés combattront dans ce qu’on a pu appeler la « bataille de Tchernobyl ». Plus de 130 000 personnes seront déplacées de cette zone : des « réfugiés » de l’irradiation. Ce lieu du massacre de la nature et des hommes a coûté, dans les années qui ont suivi la catastrophe, la modique somme de 18 milliards de roubles (presque autant en dollars de l’époque) selon les dires même de Gorbatchev. Et depuis la facture continue à s’alourdir, presque indéfiniment. Ce fut d’abord un déni global de la réalité de la tragédie, basé sur les mensonges des chefs du Parti, au point que les festivités prévues dans la région (notamment à Kiev) pour le 1er mai furent maintenues, exposant ainsi délibérément la population aux irradiations dans d’étranges parades de la mort.
La ville de Tchernobyl est reliée à Kiev par un long réservoir d’eau de 95 kilomètres de long… Il y a des nappes phréatiques et la rivière Pripiat longue de plus de 700 kilomètres, qui arrose l'Ukraine et la Biélorussie puis revient en Ukraine où elle se jette dans le Dniepr, traverse la zone de 30 kilomètres autour de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Par conséquent, elle a drainé et draine encore actuellement des radioisotopes. Peu avant la ville de Pripiat, la rivière passe sur le territoire ukrainien. Son embouchure dans le Dniepr se trouve à 25 kilomètres en aval de Tchernobyl, à plus ou moins 80 kilomètres au nord de Kiev, la capitale du pays. La vallée du Pripiat abrite le parc national biélorusse de la réserve « radio-écologique » (sic !) qui correspond à la zone la plus contaminée par l’explosion, en partie interdite d'accès aux humains mais qui accueille une faune sauvage d'un grand intérêt.
La « torche » de la « grande étoile brûlante » fut en fait une flamme de mille mètres de haut aux couleurs de l’arc-en-ciel, jaillissant du gouffre béant du réacteur 4 éventré. Un nuage pestiféré couvrira ensuite une grande partie de l’Europe.
Les radiations putrides et mortifères, qui peuvent toujours s’échapper des « fissures » du « sarcophage » de béton et d’acier (qui risque même de s’écrouler !), bâti à la va-vite par une nombreuse armée sacrifiée de « liquidateurs », nécessitent la construction d’une immense « charpente métallique » en forme d’« arche » (le groupement chargé de la construire s’appelle Novarka, « nouvelle arche » !). Il s’agit en quelque sorte d’une « mise sous cloche » pour une période de cent ans.
En russe, Tchernobyl (Чернобыль ou Чорнобиль en ukrainien, nom vernaculaire de l’armoise) peut se décomposer en Tcherno (= noir) et Byl (cf. blanc ou herbe). Ce « noir et blanc » ou cette « herbe noire » sont riches de signification. On peut aussi lire « ce (ou celui) qui était noir ». Cette couleur peut faire penser, par ailleurs, au troisième Sceau de l’Apocalypse : cheval noir dont le cavalier tient une balance à la main.
Zabutko (ou « herbe de l’oubli ») est un autre nom russe pour désigner l’armoise. Cela fait référence à un conte mythologique du district de Staro Dubsk : le jour de l'Exaltation de la Croix, une jeune fille va chercher des champignons dans la forêt et voit un grand nombre de serpents entortillés. Elle essaye de rentrer chez elle, mais elle descend dans un trou très profond qui est la demeure des serpents. Le trou est obscur, mais au fond se trouve une pierre luisante. Les serpents ont faim et la reine des serpents aux cornes d'or les guide jusqu'à la pierre luisante. Les serpents la lâchent et s'en rassasient. La jeune fille en fait autant et reste dans le trou jusqu'au printemps. A l'arrivée du printemps, les serpents s'entrelacèrent de façon à former un escalier, sur lequel la jeune fille monta pour sortir du trou. Mais en prenant congé de la reine des serpents, elle reçut en don la faculté de comprendre le langage des herbes, et d'en connaître les propriétés médicinales, à la condition de ne jamais nommer l'armoise, ou cornobil (« celui qui était noir »). Si elle prononce ce mot, elle oubliera tout ce quelle vient d'apprendre. La jeune fille comprenait, en effet, tous les propos que les herbes tenaient entre elles. Elle fut cependant attrapée par un homme qui lui demanda, par surprise : « Quelle est l'herbe qui pousse parmi les champs sur les petits sentiers ? ». « Cornobil », s'écria-t-elle, et à l'instant même elle oublia tout ce qu’elle savait ; depuis ce temps, dit-on, on nomma aussi l'armoise zabutko, c'est-à-dire herbe de l’oubli.
Tchernobyl paraît donc comme le nom de la plante noire maudite que la Reine des Serpents interdit de nommer. La transgression de cet ordre fait « boire à la coupe de l’oubli » les eaux du Léthé, un des cinq fleuves des Enfers dans la mythologie grecque.
En hébreu biblique, l’absinthe se dit la’anah (Lamed-Ayin-Noun-Hé, nom féminin qui vient d'une racine du sens supposé de maudire) et désigne aussi métaphoriquement l’amertume et le côté détestable. Dans l’Ancien Testament, la « plante maudite » est ainsi mentionnée huit fois, pour son amertume et son poison (rosh en hébreu ; cf. la tête).
Dans le Nouveau Testament, cela correspond symboliquement aussi à l’éponge de vinaigre présentée à boire au Christ sur la croix (Mt 15, 36 ; cf. Ps 69, 22 : fiel (rosh) dans la nourriture et vinaigre pour la soif). Au passage, l’église de la ville de Tchernobyl s’appelle Saint-Élie… Alors que Jésus a transformé l’eau en vin à Cana, ici les méchants transforment, dans une transmutation à rebours, le vin en poison (rosh) : « vignes de Sodome, plantations de Gomorrhe, raisins empoisonnés aux grappes amères » (Dt 32, 32), « leur vin, c’est du venin de serpent, le poison cruel des aspics » (Dt 32, 33 ; cf. Jb 20, 16).
C’est ce que l’on retrouve ainsi dans les Lamentations avec l’ivresse provoquée par l’absinthe, encore associée à l’amertume et au poison (rosh) :
« Replevit me amaritudinibus ; inebriavit me absinthio » (Lm 3, 15) ;
« Recordare paupertatis, et transgressionis meæ, absinthii et fellis » (Lm 3, 19) ;
Cf. « et circumdedit me felle et labore » (Lm 3, 5).
Notons que la nuit de la Pâque, les Israélites durent manger des herbes amères avec l’agneau rôti et le pain azyme (Ex 12, 8), et cela resta une coutume lors de toutes les célébrations de la Pâque ensuite (Nb 9, 11). La nature n’est pas précisée de ces « herbes amères », qui avaient vraisemblablement pour objectif de rappeler l’amertume de l’existence sous le joug égyptien (on pourrait dire aussi au vingtième siècle sous le joug soviétique…). C’est ce même terme hébreu (merorim) qui figure en Lamentations 3, 15.
Le même Jérémie s’en prend violemment aux faux prophètes de Jérusalem s’adonnant à l’adultère et vivant dans la fausseté et la méchanceté, pires encore que ceux de Samarie aux ordres de Baal : c’est de ces prophètes de Jérusalem que sort tout le mal. Il est question ici d’eaux empoisonnées (rosh) et de contamination de tout le pays :
« Ecce ego cibabo eos absinthio, et potabo eos felle : a prophetis enim Jerusalem egressa est pollutio super omnem terram » (Jr 23, 15 ; cf. 8, 14 et 9, 14 ; 2, 7 ; 3, 2).
Ce châtiment divin annoncé est mis en parallèle avec celui de Sodome et de Gomorrhe dans la Genèse, dont il est possible de faire ici une lecture « nucléaire », jusqu’à la femme de Lot pétrifiée (cf. le pouvoir qu’exerce la « reine des serpents » Méduse…) pour s’être retournée vers le spectacle du cataclysme d’une pluie de soufre et de feu :
« Igitur Dominus pluit super Sodomam et Gomorrham sulphur et ignem a Domino de cælo : et subvertit civitates has, et omnem circa regionem, universos habitatores urbium, et cuncta terræ virentia. Respiciensque uxor ejus post se, versa est in statuam salis » (Gn 19, 24-26).
Le prophète Amos déplore quant à lui le « changement du droit en absinthe » (Am 5, 7 ; cf. 6, 12 : « droiture en poison (rosh) et le fruit de la justice en absinthe (la’anah) »), après avoir mis en garde que Dieu ne montre sa force « tel un feu qui dévore, sans personne pour éteindre, à Béthel » :
« Quærite Dominum, et vivite (ne forte comburatur ut ignis domus Joseph, et devorabit, et non erit qui extinguat Bethel : qui convertitis in absinthium judicium, et justitiam in terra relinquitis) » (Am 5, 6-7).
Cela rejoint les malédictions que l’on trouve chez Isaïe concernant l’imposture et l’inversion des valeurs (faire passer pour amer ce qui est doux et pour doux ce qui est amer) :
« Væ qui dicitis malum bonum, et bonum malum ; ponentes tenebras lucem, et lucem tenebras ; ponentes amarum in dulce, et dulce in amarum ! » (Es 5, 20).
Un peu avant, le prophète parle de l’iniquité qu’ils tirent ou traînent avec les « cordons de l’imposture » (« in funiculis vanitatis », Es 5, 18), qui feraient référence à des pratiques magiques par lesquelles on prétendait provoquer ou hâter les événements.
Le livre des Proverbes met en garde contre l’attirance exercé par l’« étrangère » de mauvaise vie, dont le miel et l’huile se transforment en absinthe amère et en épée à double tranchant ; menant tout droit vers la mort et les enfers :
« Novissima autem illius amara quasi absinthium, et acuta quasi gladius biceps. Pedes ejus descendunt in mortem, et ad inferos gressus illius penetrant » (Pr 5, 4-5).
De même, le petit livre ouvert que mange le voyant de Pathmos est doux comme le miel à la bouche et amer aux entrailles :
« Accipe librum, et devora illum : et faciet amaricari ventrem tuum, sed in ore tuo erit dulce tamquam mel. Et accepi librum de manu angeli, et devoravi illum : et erat in ore meo tamquam mel dulce, et cum devorassem eum, amaricatus est venter meus » (Ap 10, 9-10 ; cf. Ez 3, 3).
Cette amertume que laissent les paroles mensongères et fielleuses de l’étrangère (ou de la femme d’autrui), on la retrouve aussi dans le culte des dieux étrangers par le Peuple Élu, assimilé à l’idolâtrie et à la prostitution, d’une manière générale à l’ouverture au monde (cf. le fameux aggiornamento de l’Église conciliaire…). On peut ici relire la mise en garde adressée à l’Église de Pergame contre ceux qui suivent la « doctrine de Balaam »… Le parjure à l’Alliance divine devient ainsi une « racine produisant poison (rosh) et absinthe (la’anah) » :
« Ne forte sit inter vos vir aut mulier, familia aut tribus, cujus cor aversum est hodie a Domino Deo nostro, ut vadat et serviat diis illarum gentium : et sit inter vos radix germinans fel et amaritudinem » (Dt 29, 18).
Le châtiment de cette infidélité est que le pays - véritable « terre gaste » frappée de plaies - devient infertile, ravagé par le soufre, le sel et le feu :
« Sulphure, et salis ardore comburens, ita ut ultra non seratur, nec virens quippiam germinet, in exemplum subversionis Sodomæ et Gomorrhæ, Adamæ et Seboim, quas subvertit Dominus in ira et furore suo » (Dt 29, 23).
On retrouve aussi dans Osée le châtiment qui germe comme une plante vénéneuse (rosh) :
« et germinabit quasi amaritudo judicium super sulcos agri » (Os 10, 4).
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Étoile en forme de plante ou plante en forme d’étoile, dans une correspondance macrocosme/microcosme, haut/bas ou encore ciel/terre, l’absinthe est le signe d’une terrible Némésis. Elle est une image de la « racine » même du mal et de la tentation diabolique d’infidélité. Dans la dix-septième lame du tarot, cette étoile s’incarne en femme nue qui verse l’eau (cf. le Verseau) de deux coupes…
On peut aussi en faire une lecture théologique comme un symbole de la propagation des fausses doctrines des faux prophètes de bonheur terrestre des peuples oubliant ou même combattant Dieu (le communisme par exemple) ainsi que de l’exaltation du péché (avant tout d’orgueil), de la « culture de mort » et du culte païen du mensonge d’État.
Une prise de conscience de l’amertume de la vie dans cette « vallée de larmes » peut aussi ouvrir sur l’illumination par la grâce divine menant à la vie éternelle. Ainsi, saint Bernard choisit une clairière isolée, dénommée symboliquement selon une « légende poétique » le Val d’Absinthe, pour y fonder en 1115 l’abbaye de Clairvaux (clara vallis, « vallée claire »).
De même que physiologiquement Dieu a fait que le poison a souvent un goût amer et repoussant pour le recracher spontanément (les survivants de Tchernobyl parlent quant à eux de goût métallique dans la bouche dû à l’irradiation…), l’absinthe représente l’amertume du péché-poison dont le salaire est la mort :
« Stipendia enim peccati, mors. Gratia autem Dei, vita æterna, in Christo Jesu Domino nostro » (Rm 6, 23).
Une lecture plus particulière peut être faite par rapport aux destinées du Peuple Élu (lui-même métaphore du reste de l’humanité). Ainsi la tenture n°22 de la série de tapisseries appelées « L’apocalypse d’Angers » montre l’Étoile Absinthe sous la forme d’une étoile jaune à six branches. La prophétie peut aussi nous faire penser au terrible fléau de la Peste noire qui frappa l’Europe au milieu du quatorzième siècle et décima un tiers de sa population. A l’époque on accusa (à tort !) les Juifs d’avoir empoisonné les sources d’eau pour pouvoir les mener au bûcher…
La statue du Titan Prométhée, ayant volé le feu (nucléaire ?) aux dieux, était au centre de Pripiat devant le cinéma, la ville (désormais morte !) la plus proche de la centrale et où vivaient ses travailleurs. Elle a été transportée après l’accident dans les décombres de l’entrée de l’usine nucléaire, où sont stockés les déchets... Curieusement aussi, un parc d’attraction (avec sa grande roue) devait être inauguré à Pripiat le 1er mai 1986, mais il fut ouvert quelques jours avant, au moment du drame… Le paradis sur terre de l’utopie socialiste s’est transformé en un instant en véritable enfer sur terre. On peut se demander aussi si le Sionisme, ayant abouti à l’établissement de l’État juif dans une inversion des valeurs et une confusion entre le spirituel et le temporel, entre Jérusalem céleste et Jérusalem terrestre, ne participe pas quelque part de la même tragique utopie et illusion…
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La grande absinthe ou armoise (Artemisia absinthium L.) est une plante de la famille des Astéracées (aster signifie étoile en latin), généralement associée à la couleur verte (dans sa dimension négative comme pour le « cheval verdâtre » de l’Apocalypse, monté par la Mort), ainsi qu’à la souffrance, la folie et la mort (en raison principalement aussi de la boisson alcoolisée). Le nom latin absinthium est emprunté au grec apsinthion (« qu'on ne peut pas boire » ?) ou même apsintos (« privé de douceur »). Ses feuilles sont en général blanches et gris-verdâtre et ses fleurs jaunes. Artémis, lunaire et chasseresse, nom grec de la Diane latine, est aussi la déesse des morts subites et de la vie sauvage de laquelle sont chassés les hommes. C’est à cet état sauvage qu’a été ramenée cette « terre des loups » entre terres russes, ukrainiennes et biélorusses. En effet, loin de créer un désert où plus rien ne vit, ne pousse ni ne bouge, l’irradiation nucléaire a provoqué une prolifération anarchique de la nature, avec parfois d’étranges mutations génétiques et la création de monstres (qu’en est-il des hommes à ce sujet ?). Cette « nouvelle création », fruit du péché, apparaît comme une parodie satanique de la création du monde par Dieu… Artémis, manifestation méditerranéenne de la « Grande Déesse » ou « Déesse Mère », avait son grand temple à Éphèse : « existerait-il quelqu’un qui ne sache pas que la cité d’Éphèse est la ville sainte de la grande Artémis et de sa statue tombée du ciel ? » (Ac 19, 35). Cette Ukraine de Tchernobyl, fer de lance de la puissance américaine en Europe, a produit aussi les hystériques et agressives FEMEN, ces « artémisiennes » amazones des temps modernes arborant leurs seins et leurs slogans et rejoignant, par d’étranges détours, la Marianne tout aussi blasphématoire sanctifiée par la République Française…
L’utilisation humaine de l’énergie nucléaire semant la mort (d’Hiroshima et Nagasaki jusqu’à Fukushima, en passant donc par Tchernobyl et son fameux nuage toxique dont le « brouillard » de mensonges obscurcit encore nos esprits aussi) est proprement diabolique ; tout comme d’ailleurs l’économie moderne centrée autour de l’« or noir » du pétrole. Herbes folles et sauvages, brûlantes, dévorantes, sombres et amères, ce véritable désastre écologique et humain (et aussi spirituel !) à très long terme semble aujourd'hui passer au second plan dans l'oubli des hommes, comme un mirage fantomatique et cauchemardesque, mais il reste d'une terrible et morbide actualité… Il est étonnant que le pape François n’est pas mis en avant, dans son encyclique Laudato si (2015), cette catastrophe que le lobby nucléaire (particulièrement français…) continue à vouloir minimiser…
Jean-Marc Boudier
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La « Croix Glorieuse » de Dozulé : erreur ou mensonges ?
On ne peut être que désagréablement surpris de constater l’ampleur de la diffusion et l’écho national et international qu’a eu le pseudo-message du Christ à Dozulé dans le Calvados. Ce qui pourrait apparaître comme une simple agitation naïve voire ridicule d’esprits crédules, faibles et influençables, égarés par le mirage auto-valorisant de révélations privées et de prédictions extraordinaires, montre aussi des signes plus discrets autrement inquiétants et suspects.
La recrudescence actuelle de sectes pseudo-chrétiennes pose vraiment problème et doit obliger le Magistère, pour y répondre et y faire face, à un retour à la tradition authentique, à une ligne clairement tracée et définie et à une doctrine sûre et solide, loin de tout fanatisme et obscurantisme. On peut se demander si, face à l’acharnement et à l’obstination des adeptes de Dozulé (« il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir et pire sourd que celui qui ne veut pas entendre »), l’Église locale ne va pas être tentée aussi de détourner « vers le bon chemin » le flot des « pèlerins » qui continuent malgré tout à venir sur place (sans parler bien-sûr de reconnaissance ou de récupération).
Le « climat passionnel », l’ « atmosphère apocalyptique » et le « mysticisme incontrôlé » qui règnent autour de cette affaire vieille de plus de 40 ans semblent bien éloignés de la vraie dévotion chrétienne et de ses fruits spirituels (car l’on doit « juger un arbre à ses fruits »). Malgré que l’on ait fait ici abattre un pommier tordu pour désigner l’emplacement de la future croix, nous avons plutôt à faire avec une « pomme de la discorde » qui sème le trouble et la confusion dans les esprits et dans les cœurs et invite même plus loin à la superstition et à l’idolâtrie.
Forts de leurs convictions en leur « mission divine », les adeptes de Dozulé se livrent depuis des années à une véritable propagande organisée, usant d’insinuations, de pressions, d’amalgames, de récupération, d’entrisme, d’activisme et de lobbyisme à tout va.
On peut noter chez eux un refus, malgré souvent des protestations de façade, de recourir à un vrai discernement spirituel et à l’autorité ecclésiastique, ainsi qu’une recherche dangereuse et illusoire des phénomènes et manifestations et une dévotion uniquement sensible et sentimentale (jouant sur les émotions et notamment la peur). Un fort sentiment de complot apparaît souvent aussi, comme s’ils étaient les pauvres victimes d’une puissance ecclésiastique qui chercherait à étouffer l’affaire, à mettre « la lumière sous le boisseau » et à se livrer sur eux à une inquisitoriale « chasse aux sorcières ».
La première apparition de cette « Croix Glorieuse » - croix blanche et lumineuse sans le Christ et donc apparemment différente de l’instrument du supplice de la Passion, rouge du Sang versé pour notre salut ! - à une brave paroissienne et mère de famille sans instruction de Dozulé dénommée Madeleine Aumont (en qui l’on veut bien voir la « Marie-Madeleine des temps modernes », une nouvelle Jeanne d’Arc et l’ultime apôtre du Christ et prophétesse de la fin du monde ayant eu pas moins de 49 apparitions miraculeuses !) remonte au 28 mars 1972. Toute une série d’apparitions auront lieu de 1972 à 1978 (avec même selon certains une apparition plus tardive en songe).
Dozulé est ensuite présentée comme la Nouvelle Jérusalem - voire l’Arche de Noé de nos temps actuels - qui seule sera sauvée du cataclysme final, avec sa gigantesque « Croix Glorieuse » et son « Sanctuaire de la Réconciliation » qui doivent être bâtis sur la Haute-Butte (lieu privé). Ce serait même la « Clef de voûte de l’ensemble de la Révélation » (sic !) et l’« Unique Planche de Salut » (resic !), selon un certain Dr Jacques Pelbois (et d’autres) !
Malheureusement (ou heureusement !), la « Grande Tribulation » imminente annoncée avant la fin du vingtième siècle n’est apparemment pas arrivée. Pour se rattraper, les sectateurs de Dozulé vont alors argumenter que c’est grâce à leurs nombreuses et incessantes prières aux pieds de la « butte aux prodiges » que la troisième guerre mondiale n’est pas (encore) arrivée…
L’étrange théologie énoncée à Dozulé - il faut le dire assez simpliste et inconsistante - paraît par certains aspects bien bizarre et peu traditionnelle, parfois présentée comme un fruit de Vatican II (liberté de conscience, apostolat des laïcs, œcuménisme, ouverture au monde, nouvelle évangélisation, humanisme et sentimentalisme, nom de la fête de la Croix Glorieuse, etc.), parfois incorporée à un discours « traditionnaliste ». Un virulent reproche est systématiquement fait à l’évêché et aux prêtres (à l’Église en général) de ne pas diffuser et approuver officiellement ce « message divin » qui n’en est pas un, curieusement d’un œcuménisme de mauvais aloi et finalement peu catholique.
Une enquête canonique et la réponse de Rome qui approuve ses résultats, en parlant aussi d’ « affaire à suivre ultérieurement avec la même vigilance prudente » (cardinal Ratzinger), ont été rendues publiques en 1985. A partir de ce même texte, certains ont conclu à un rejet sans appel et définitif (ce qui est en fait le cas) et d’autres au contraire à une porte laissée ouverte à la libre dévotion privée des fidèles. Monseigneur Badré précisait pourtant que « les écrits publiés contiennent des accents et des exigences tout à fait inacceptables ». Et en 1991, l'évêque de Bayeux-Lisieux Pierre Pican avait ainsi averti : « Le pseudo-message de Dozulé, dont l'extravagance et le caractère absolu ne méritent pas qu'on s'y arrête, est habilement commercialisé sous la forme de tracts, de supports médiatiques, d'appels divers relancés régulièrement, d'ouvrages de vulgarisation. Cette surabondance donne une impression de sérieux : elle est proprement illusoire et rallie les gogos. »
Il est vrai que l’on peut trouver dans le commerce une abondante et médiocre littérature plutôt extravagante et indigeste (à notre connaissance apparemment uniquement favorable aux évènements), où se sont engouffrés des éditeurs comme Résiac, Les Nouvelles Éditions Latines ou encore François-Xavier de Guibert. A chaque leader, derrière chaque groupe qui essaye de récupérer la « mission sacrée » des « messages » en prétendant être le seul représentant et porte-parole légitime, de publier son ouvrage pour attirer de nouvelles recrues.
La « Croix Glorieuse » de Dozulé, « ville bénie et sacrée qu’aucun cataclysme n’atteindra » (sic !), est présentée comme le « signe du Fils de l’Homme » (Matthieu au chapitre 24). Le Christ aurait donné des indications très précises pour l’érection de ce monument : chaque bras de la croix doit mesurer 123 mètres (largeur de 2 x 123 + 41 = 287 mètres) et sa hauteur six fois plus (6 x 123 = 738 mètres, qui est l’altitude de Jérusalem mais où certains ont vu 666+72). Cette hauteur est aussi curieusement proche de celle de la statue du Christ Rédempteur (38 mètres avec le piédestal) du Corcovado (altitude de 710 mètres) à Rio de Janeiro.
A partir de quelques simples indications de grandeur données par la « voyante », des « disciples » plus ou moins autoproclamés ont largement développé le message avec des considérations assez fumeuses de numérologie et surtout des études scientifiques fort savantes et précises, confondant souvent perfection spirituelle et prouesses technologiques ! Certains ont pu même voir dans l’érection de la croix une manne providentielle pour relancer l’économie touristique du Pays d’Auge et faire « miraculeusement » baisser le chômage !
Par certains côtés, Dozulé - qui par son étymologie signifie la « colline qui brûle » et qui était un bien des Augustins de droit romain, un Prieuré-cure dépendant de Sainte-Barbe-en-Auge (12e siècle) puis aussi de l’Abbaye Sainte-Geneviève de Paris (17e siècle) - rappelle le climat de fièvre eschatologique et politique assez douteux qui entourait les apparitions de La Salette. Aujourd’hui on pourrait faire de même un parallèle avec l’effervescence pseudo-mystique autour des soit-disantes apparitions mariales de Medjugorje, pareillement non reconnues par l’Église locale, ou des révélations privées de Don Gobbi, le fondateur du Mouvement Sacerdotal Marial.
On peut aussi se demander si Dozulé (et l’ensemble non homogène des groupes et associations plutôt fanatisés et sectaires qui gravitent autour) ne représente pas quelque part une « face sombre » et parodique du mystère du haut-lieu sacré de Lisieux. Il y aurait ici une réflexion à approfondir.
Donnons pêle-mêle quelques exemples de ces groupes autour de Dozulé : « Ressource », « La Famille de Nazareth », « Association des Amis de la Croix Glorieuse de Dozulé » (Paris, Mme Roque en 1982) et Résiac, « Association Catholique de Bretagne : Les Amis de Dozulé » (Jean Stiegler en 1984), « Association Catholique de Dozulé » (les Avoyne en 1993), « Paix et Joie pour la Croix du Seigneur » (Odette de Lannoy), etc. A noter au passage qu’il existe aussi une « Communauté de la Croix Glorieuse » (communauté du « Renouveau charismatique » fondée en 1981 et implantée aujourd’hui surtout à Perpignan et à Toulouse) qui n’est pas liée à Dozulé mais pose de même quelques problèmes.
La Croix de Dozulé semble faire insulte à l’Exaltation de la Sainte-Croix (14 septembre), comme si elle voulait instaurer en quelque sorte une nouvelle fête le 28 mars. Il faudrait revenir à une bonne compréhension de ce que représente le vrai Crucifix (la « Haute-Butte » devant apparemment pour certains remplacer en quelque sorte le Golgotha…) et à une lecture plus authentique et traditionnelle de l’Apocalypse et des Écritures en général.
C’est l’occasion pour nous aussi de redécouvrir la richesse et la profondeur de la fête de la Croix Glorieuse du Christ (ou Exaltation de la Sainte-Croix), mort et ressuscité pour nous, et lui redonner tout son sens véritable dans une tension paradoxale vivificatrice, relevant de l’ « antinomisme » qui dépasse les oppositions (comme par exemple dans l’expression chrétienne orientale de « douloureuse joie »).
A défaut de la réalisation (vraiment plus qu’improbable, surtout qu’il s’agit d’un site protégé) du projet pharaonique demandé initialement, des « Croix d’Amour » miniatures au 1/100ème (7,38 mètres quand même) ou aussi « Croix de la Paix » (cf. le « Mouvement Universel pour la Paix » et les élucubrations d’un certain psychanalyste qui s’est beaucoup agité autour du message de Dozulé…) sont désormais proposées par certains (au grand dam des élus et habitants des lieux où ces croix sont érigées plus ou moins sauvagement)… C’est là une habile manière de rebondir face au premier échec !
Et l’argument ultime d’une géographie sacrée de la France où un M marial apparaîtrait avec la Croix de Dozulé en son centre et sommet n’est pas très convaincant. De même pour certains la « Croix Glorieuse » serait la nouvelle Croix de Lorraine destinée à sauver la France et le monde. Rien de moins…
Que penser donc de ces « apparitions » et « messages » et surtout de ce projet architectural qui mêle démesure, bêtise et laideur ? Faut-il voir dans cette affaire originale (mais finalement pas si isolée que l’on peut croire), qui discrédite et ternit quelque part l’image d’une Église déjà si mal en point, une manifestation du mensonge de celui qui sait habilement se transformer en ange de lumière pour tromper les croyants mêmes ? Un silence paraît être fait sur certaines infestations diaboliques qui semblent s’être manifestées aussi. Notons au passage qu’un père franciscain exorciste, le P. Curty qui avait été dépêché pour donner son avis sur les faits, semble s’être rallié à la cause de la « Croix Glorieuse ».
La « voyante », quant à elle, ne semble avoir tiré aucun profit personnel de cette affaire (à part malgré tout une certaine mise en valeur de sa personne à laquelle elle ne s’oppose pas) et ne pas avoir souffert apparemment de « délire mystique » et de troubles psychiatriques.
A moins qu’il ne s’agisse aussi d’une habile forgerie d’une personne ou d’un groupe de personnes qui aurait manipulé et influencé cette pauvre Madeleine, tenue depuis dans un certain silence et anonymat (mise sous curatelle en 2003 dans une maison de retraite médicalisée), et qui apparaît comme un certain « égrégore » d’influences psychiques plutôt qu’authentiquement spirituelles.
L’ancien recteur de Dozulé (l’abbé Victor L’Horset, directeur spirituel de Madeleine et désigné par elle dans ses « messages » comme « le Prêtre » et par lui-même comme « le premier témoin »), présent lors des extases de la « voyante » pendant six ans, y croyait dur comme fer dès le début et semble avoir occupé une part très importante dans la prise au sérieux de ces phénomènes plutôt douteux devenus depuis un réel point de focalisation et de ralliement (d’autres « voyantes » se sont même manifestées depuis pour corroborer les « messages »). La position réelle du premier curé semble en fait assez ambigüe, fervent promoteur des « messages » mais cherchant aussi à freiner quelque peu leur diffusion auprès des autorités ecclésiastiques et civiles et en censurant apparemment quelques-uns considérés par lui comme « diaboliques ».
Une amie de Madeleine, Suzanne Avoyne (le couple Avoyne est propriétaire des terrains de la Haute-Butte et du « Bassin de la Purification »), tient aussi une place importante dans l’affaire.
Un point est encore à noter : la plupart des « apparitions » se passent non dans la solitude et le secret mais devant témoins (prêtre, religieuses, laïcs : certains « messages » leur sont d’ailleurs curieusement adressés en partie) et on peut se demander alors s’il n’y a pas quelque part une profonde influence du milieu et de l’entourage, sans forcément parler de manipulation délibérée et immédiate (bien que peut-être…). L’archevêque de Paris Mgr Vingt-Trois a pu parler ainsi d’ « instrumentalisation de Madeleine ».
Le fait que les « messages » transmis soient dans un français assez recherché et surtout souvent en latin, que la « voyante » ne connaissait pas, pose aussi problème et laisse à réfléchir (rappelons au passage qu’à Lourdes la Vierge avait parlé à sainte Bernadette dans son patois…).
Nous tenons à préciser que ces quelques modestes réflexions n’ont répondu qu’à une volonté de faire le point à ce jour sur cette histoire normande (parfois aussi bretonne), n’engagent que nous, ne constituent aucunes attaques personnelles et sont émises selon nos moyens, notre état et les informations publiques portées à notre connaissance.
Jean-Marc Boudier
*
Article I : En vertu des canons 823 et 824 du Code de droit canonique, je réprouve formellement la publication de livres, brochures, prières, cassettes, qui ne portent pas l’approbation d’un Ordinaire.Article II : Je ne reconnais pas comme «sanctuaire», c’est-à-dire comme «lieu sacré où les Fidèles se rendent nombreux en pèlerinage, pour un motif de piété, avec l’approbation de l’Ordinaire du lieu» (Can. 1230) le domaine de «La Haute Butte» de Dozulé.
Article III : En conséquence j’interdis toute propagande et spécialement toute collecte de fonds en vue de la construction d’un sanctuaire ou de l’édification d’une croix gigantesque en ce lieu (Can. 1265, § 1). De même, j’interdis l’édification de tout sanctuaire (église, oratoire, calvaire) sur ce territoire de la Paroisse de Dozulé (Can. 1215, 1224).
Article IV : Restant saufs les droits du Curé sur le territoire de la Paroisse de Dozulé, j’interdis à tout Prêtre :
– d’organiser ou de présider toute réunion en relation avec le «message» de Dozulé ;
– de célébrer l’Eucharistie dans les mêmes circonstances; et précise que tout Prêtre qui, obstinément, enfreindrait les interdictions contenues dans cet article IV, s’expose à être privé dans le diocèse de Bayeux de la juridiction nécessaire pour entendre les confessions et, éventuellement, d’être frappé de suspense.*
« A cette Ordonnance et à la lettre de Monsieur le Cardinal de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, j'ajoute la déclaration qui suit.
Célébrer la Croix glorieuse, l'Église le fait solennellement le 14 septembre et les innombrables calvaires de nos campagnes et de nos villes sont le signe de la dévotion des catholiques envers la Sainte Croix. La Croix, instrument de supplice, s'affirme depuis le Vendredi saint et le jour de Pâques comme source de lumière et de force, grâce au Christ qui accepta d'en faire un signe visible du don gratuit de son amour pour les hommes. Vénérer la croix, l'Église l'a toujours fait et plus spécialement le Vendredi Saint.
Prier pour la rédemption du monde, c'est ce que fait l'Église chaque fois qu'une messe est célébrée : « Voilà pourquoi, Seigneur, nous célébrons aujourd'hui le mémorial de notre rédemption : en rappelant la mort de Jésus-Christ et sa descente au séjour des morts, en proclamant sa résurrection et son ascension à ta droite dans le ciel, en attendant qu'il vienne dans la gloire, nous t'offrons son corps et son sang, le sacrifice qui est digne de toi et qui sauve le monde. » (Prière eucharistique IV). Le sacrifice de la messe est célébré « dans la communion de toute l'Église » et en lien avec le Pape et l'Évêque de l'Église diocésaine, cf. Prière eucharistique I.
Dans cet esprit, il me semble important de faire les remarques suivantes :
1) L'Église dont la foi se fonde sur la Révélation transmise par les Apôtres n'est jamais engagée par la manière dont chaque fidèle exprime sa propre foi. Les grâces particulières reçues par chacun sont d'abord personnelles et il appartient à l'autorité de l'Église de discerner si ces grâces ou charismes peuvent servir à l'édification du Peuple de Dieu.
2) Pour ce qui se passe à Dozulé, l'action et l'agitation, la collecte de fonds par des personnes n'engageant que leurs seules responsabilités, sans mandat, sans aucun respect de l'autorité de l'évêque, la propagande fanatique en faveur du « message », la condamnation sans appel de ceux qui ne s'y rallient pas, me fait estimer en conscience, qu'au delà de toute cette agitation, je ne peux discerner les signes qui m'autoriseraient à déclarer authentiques les "apparitions" dont il est fait état, ou à reconnaître une mission qui serait donnée à l'Église de diffuser ce « message ».
3) A côté des appels à la conversion, à la confiance envers la Croix glorieuse et à la dévotion eucharistique, les écrits publiés contiennent des accents et des exigences tout à fait inacceptables :
- la valeur salvatrice de la seule démarche faite à Dozulé,
- le caractère ultime et exclusif du « message »,
- la mise en valeur de Dozulé, de la Haute Butte, « Terre sainte, nouvelle Jérusalem »,
- l'eschatologie douteuse assez mal venue à l'approche de l'an 2 000,
- sans parler des détails matériels (en particulier des dimensions gigantesques de la Croix). » (Mgr Jean Badré, évêque de Bayeux-Lisieux, 8 décembre 1985).*
« Nous vivons un moment privilégié de communion d’Église, ici, à Lourdes, frères et sœurs.
Nous expérimentons en même temps les fragilités de la communion lorsque des frères et sœurs s’estiment investis d’une mission de diffusion d’un prétendu message en faveur de Dozulé.
N’allez surtout pas à Dozulé le 17 septembre 1989. Inutile de vous rassembler sur cette prétendue Butte aux prodiges.
Les esprits enclins à développer des rapports de force et à diffuser la propagande pour une option partisane s’y retrouveront. Sachez qu’ils ne seraient pas en communion avec l’Église.
Ils s’emploient à récupérer Lisieux en Sainte Thérèse et à s’imposer des rassemblements eucharistiques pour avoir une messe... » (Homélie de Mgr Pican, évêque de Bayeux-Lisieux, à Lourdes, le vendredi 1er septembre 1989 au cours de la messe diocésaine).
*
« Rien de nouveau… Le piège à gogos ! Non aux pressions, non à l’amalgame. Non aux pseudo-messages.
Nombre de chrétiens de bonne volonté, de bon sens et de bonnes dispositions s’inquiètent, à bon droit, des pressions exercées par les messagers de la cause de Dozulé. Ils écrivent et demandent des clarifications.
Personne n’a aucun mandat de diffusion et ne peut se prévaloir de l’avoir reçu de l’évêque de Bayeux et de Lisieux. Monseigneur Badré a établi un document sous la forme d’une ordonnance en 1985, prolongée par sa Déclaration du 8 décembre de la même année. Je vous demande de vous y référer et de vous y conformer. Ces documents constituent la réponse de l’Église et établissent sa position. Les termes retenus en 1985 valent pour 1991 et les années à venir. Ces pressions déplacées, extravagantes et fanatiques développent une attitude sectaire, incompatible absolument avec celle dont doivent se réclamer les fidèles de l’Église catholique. Les partisans de la thèse de Dozulé et ses diffuseurs ne sont pas en communion avec l’Église.
Dans le souci d’éclairer les chrétiens, je demande aux fidèles de l’Église catholique de ne pas se laisser intoxiquer par la propagande sans fondement sur ce phénomène. En outre, le Domaine de la Haute-Butte ne doit, en aucun cas, être considéré comme un lieu sacré approuvé par l’Ordinaire de ce diocèse. Je maintiens les dispositions de l’Ordonnance du 24 juin, établie par Monseigneur Jean Badré, mon prédécesseur, ainsi que les termes de sa Déclaration du 8 décembre 1985 .
J’interdis donc à tout prêtre d’organiser, d’accompagner et à plus forte raison de présider toute réunion en relation avec ce pseudo-message de Dozulé et de participer à des rassemblements sur la Haute-Butte.
J’interdis également à tout prêtre de célébrer l’Eucharistie sur la Haute-Butte, notamment le 28 mars 1991, et de célébrer dans le cadre explicite d’un pèlerinage ce jour-là, comme les autres jours, à l’intention de Dozulé. Ne détournons pas l’Eucharistie à des fins partisanes, surtout le jour où les communautés chrétiennes, rassemblées dans la communion, font mémoire du Sacrement de l’Amour en solennisant le Jeudi-Saint et le signe de l’unité.
Ce pseudo-message, dont l’extravagance et le caractère absolu ne méritent pas qu’on s’y arrête, est habilement commercialisé sous la forme de tracts, de supports médiatiques, d’appels divers relancés régulièrement et d’ouvrages de vulgarisation. Cette surabondance donne une impression de sérieux : elle est proprement illusoire et rallie les gogos. Elle réussit même à opposer les associations qui se prévalent de diffuser le véritable et authentique message et ses multiples versions de référence.
Ne nous laissons pas abuser par cette surenchère commerciale et mensongère. Il faut raison garder, foi célébrer, charité développer, souci des petits et des humbles renouveler.
Puisse le fanatisme déchaîné, cultivé et habilement développé par une poignée d’exaltés ne pas nous inquiéter. L’Église a arrêté la position à tenir et à communiquer. Tenons-la. Diffusons-la. » (Mgr Pierre Pican, évêque de Bayeux-Lisieux, le 15 mars 1991).